La prochaine réunion ministérielle de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) à Malte les 5 et 6 décembre sera dominée par une figure controversée : le ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov. Si Lavrov assiste à cette réunion, ce sera sa première visite dans un pays de l’UE depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022, soulevant des questions sur les implications pour la diplomatie européenne dans un contexte de tensions persistantes.
Bien qu’il soit sanctionné par l’UE, l’interdiction de voyage de Lavrov peut être temporairement levée pour des réunions internationales officielles. Sa présence signale un potentiel dégel de l’isolement diplomatique, renforcé par l’appel récent du chancelier allemand Olaf Scholz au président russe Vladimir Poutine, le premier en plus de deux ans.
Une Présence Divisive
Des initiés de l’OSCE suggèrent que la visite de Lavrov vise à aborder des questions pressantes, notamment le remplissage de quatre postes supérieurs laissés vacants depuis septembre, la détermination des présidences futures et la finalisation du budget de l’organisation pour 2025. Cependant, la présence de Lavrov devrait susciter des controverses. Lors de la réunion de l’OSCE de l’année dernière en Macédoine du Nord, l’Ukraine et les États baltes avaient quitté la salle pendant son discours, et un protest similaire pourrait se produire à Malte.
Les réponses diplomatiques aux discours de Lavrov ont évolué. Alors que les représentants de l’UE avaient précédemment boycotté ses déclarations, des réunions récentes, comme le sommet des ministres des Affaires étrangères du G20, ont vu des responsables rester pour contrer ses récits directement. Ce changement souligne un débat croissant sur la manière d’aborder la diplomatie russe : confrontation ou engagement ?
Comblage des Lacunes de Leadership
Un défi clé pour l’OSCE reste de pourvoir les rôles de leadership. Malte, qui occupe actuellement la présidence, a proposé le ministre des Affaires étrangères albanais Igli Hasani au poste de secrétaire général, en plus de candidats pour d’autres postes de haut niveau. Cependant, des propositions alternatives de la Grèce et de la Turquie suggèrent de remplacer Hasani par le ministre turc des Affaires étrangères Feridun Sinirlioglu et de nommer la diplomate grecque Maria Telalian pour diriger le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (ODIHR).
L’opposition de Moscou à certains candidats, comme Ketevan Tsikhelashvili de Géorgie, reflète des tensions géopolitiques plus larges. La Russie s’oppose à l’implication de Tsikhelashvili dans la réintégration de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie, des territoires sous occupation russe.
Implications Plus Larges
La réunion ministérielle met également en lumière des problèmes non résolus au sein de l’OSCE. Bien que la Finlande, membre de l’OTAN depuis 2024, soit prête à présider en 2025, le leadership futur reste contesté. Des nations d’Asie centrale ou des micro-États européens comme Saint-Marin sont envisagés pour 2026, la Turquie exprimant son intérêt pour accueillir un sommet de haut niveau de l’OSCE à Istanbul.
Les disputes budgétaires compliquent encore les choses. Le budget proposé de 158 millions d’euros pour 2025 comprend des ajustements de financement pour l’inflation et les salaires. La Russie a résisté aux allocations pour l’ODIHR, qu’elle considère comme politiquement biaisée, tandis que l’Azerbaïdjan s’oppose au financement du Groupe de Minsk, arguant que le conflit du Haut-Karabakh est résolu.
Un Équilibre Diplomatique
La présence de Lavrov pourrait offrir une opportunité de dialogue, mais elle risque également de raviver les divisions au sein de l’OSCE et de ses États membres. Avec l’Ukraine prévue pour prendre la parole en premier lors de la session ministérielle, le terrain est préparé pour une autre confrontation tendue. La capacité de Lavrov à influencer le récit sera scrutée de près, tout comme la réponse de l’UE à sa présence sur le sol européen.
La réunion de Malte souligne l’équilibre délicat de la diplomatie dans un environnement géopolitique fracturé. Que l’apparition de Lavrov favorise des progrès ou approfondisse les divisions déterminera le rôle de l’OSCE dans l’adressage des défis régionaux et mondiaux dans les années à venir.